On parle beaucoup de de Vigan que je n'avais jamais lu. J'ai décidé de me faire ma propre opinion avec ce petit roman...
Un peu d'histoire...
Lou Bertignac est ce qu'on appelle une surdouée: elle est en seconde avec deux ans d'avance. Elle n'est pas très proche de ses camarades, même si elle a un faible pour Lucas, le "cancre" de la classe. En attendant de se faire remarquer par lui, Lou reste dans son coin.... Souvent, elle va à la gare dAusterlitz pour observer les gens. C'es là qu'elle remarque pour la première fois Nolwenn, surnommée No, qui est une jeune SDF. Quand le prof de Lou demande à des élèves de choisir un thème pour un exposé, Lou n'hésite pas : ce sera les SDF. Et elle décide d'aller interviewer No. Son professeur la met en garde et lui demande de ne pas y aller seule... Lou lui dit qu'elle va y aller avec ses parents mais c'est faux...Il faut dire que les parents de Lou ont autre chose à faire: la famille vit avec une lourde tragédie et sa mère, depuis, n'est plus qu'un robot. Elle remarque à peine l'existence de Lou. C'est donc bel et bien seule que Lou se rend à la gare pour aborder No. Très vite, les deux filles prennent l'habitude de se rencontrer dans un bar. No parle peu mais fort, boit beaucoup, s'emporte mais s'endort aussitôt après. Quelle histoire peut bien se cacher derrière cette jeune fille ?
Un peu d'avis...
No et moi n'est probablement pas le roman du siècle mais il m'a pourtant fait une forte impression. Tout d'abord, j'ai apprécié l'écriture délicate de de Vigan qui colle magnifiquement au personnage de Lou, petite ado atypique. La bande formée par Lou, Lucas et No incarne l'adolescence comme elle est rarement représentée: ici pas de clichés, ces ados vibrent, ressentent, souffrent, tentent de continuer à vivre quand tout semble détruit, dévasté autour d'eux. Ils sont sensibles au monde qui les entoure et qu'ils parviennent difficilement à comprendre. Lou, en premier lieu, est une ado idéaliste - pour ne pas dire "angélique"- qui cherche à aller au-delà des mots adultes, des "tu ne peux pas comprendre" ou "ce n'est pas possible". Elle, elle veut comprendre et rendre les choses possibles. Ce roman -à bien des égards initiatique- montre que l'on peut changer les choses. Même un petit peu. Même pour pas longtemps.
Le roman se distingue par une certaine retenue. Une pudeur. Il faut souvent savoir lire entre les lignes pour comprendre l'histoire des personnages. ici les mots ne disent pas grand chose : c'est dans les blancs que l'on comprend le mieux les personnages. Le personnage de Lou est vraiment plein de finesse et de poésie: véritablement "à part", elle peine à s'intégrer. Il lui faudra rencontrer une marginale pour se sentir appartenir à un clan, à une "famille". J'ai vraiment aimé ses adolescents un peu "en vrac" qui se trouvent, s'aiment, se perdent un peu pour mieux se retrouver.
Le monde des adultes n'est pas pour autant laissé de côté. Les parents de Lou jouent évidemment un grand rôle dans le roman: ils sont ceux qui vont probablement le plus changer au contact de No. Ils vont s'ouvrir au monde, aux autres et en premier lieu, à cette fille qu'ils ont tant mise de côté. Quant à Lucas et No, ils incarnent - à leur manière- l'enfance maltraitée, ruinée, piétinée. Ils n'ont pas du tout le même milieu social, pas du tout le même genre de parents mais ils sont tous les deux livrés à eux-mêmes. Lou, l'adolescente préservée - mais pas tant que ça- va se sentir proche d'eux. Elle va découvrir à leur contact un monde inconnu, nu, brutal. Certaines scènes sont touchantes et de Vigan retranscrit parfaitement le mal de vivre. Au final, est donc un joli roman, ni plus, ni moins, à mettre entre toutes les mains.
