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Bonsoir,

J'ai besoin d'aide en urgence pour la réponse à la problématique de l'arche la défense : En quoi l'architecture symbolise la mise en place du pouvoir de l'espace ?

S'il vous plaît ... Merci d'avance


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Ils se marièrent le 9 juillet 1924 à l’église évangélique de la West Sixteenth Street, à New York. Leur amour - même si leurs relations parfois tendues et contradictoires donnaient "l’impression qu’un divorce pouvait surgir à chaque minute" - dura jusqu’à sa mort à lui, survenue le 15 mai 1967. Edward et Josephine, ou plutôt Jo et Eddie, pour le meilleur seulement, dirait-on, en écartant le pire, car ce qu’ils lèguent est un magnifique exemple de communauté d’intérêts et surtout de passion artistique, d’entente et de connivences. Une photo prise en 1964 lorsqu’ils sont l’un et l’autre âgés confirment ce chemin de vie commun. Unis dans l’existence mais séparés apparemment dans le travail, du moins occupés à suivre chacun la ligne qui permet de répondre à une vocation pour lui, de l’expliciter et de la valoriser pour elle. Leur collaboration a résisté au temps, aux succès, aux silences de l’un et aux impatiences de l’autre. Edward est timide, paisible, elle est expansive, sociable. "Parfois, parler avec lui était comme jeter un caillou dans un puits, à cette différence près qu’on ne l’entendait pas heurter le fond". Il est habité par sa peinture, elle se charge de la commenter, d’en conserver la trace jusqu’au détail, de préserver comme un souvenir nécessaire la genèse de chaque tableau. Edward prend le pinceau, Josephine choisit la plume. A la sobriété s’oppose la prolixité.  A eux deux, c’est toute la richesse d’une œuvre qui se compose à quatre mains. Il en est le créateur, elle en sera la mémoire. Jamais sa fidélité à traduire dans les détails les éléments visuels des tableaux ne s’est démentie. Les ledgers, les registres, sont ainsi le double enregistrement des tableaux, la "biographie partagée" du couple, de deux collègues, de complices et d’associés.

 

Chaque tableau d’Edward Hopper semble directement lisible, sans ricochet à deviner, sans détour à prendre. En fait, cette apparente simplicité se déplie en phases, en rebond, en interrogations sur le sens des destinées, sur le rôle des objets, sur l’intervention de la matérialité qui est architecture et support de l’action. Rien au contraire dans ces tableaux qui ne se répercute davantage dans les réminiscences, dans l’inconscient ou qui ne soit évocation d’une Amérique intérieure, celle des grands espaces et des petites villes où l’attente de quelque événement est une obligation parce qu’il n’y a pas d’autre alternative, où l’on ne dialogue pas, où le temps est à l’arrêt, où l’angoisse est compagne quotidienne et la solitude sinon la lassitude sont ordinaires. Les lieux pourraient être ici ou ailleurs, dans un Etat de l’Ouest ou du centre de l’immense  nation. La lumière qui naît de partout ne s’éteint nulle part. Elle est sans source, sans direction, omniprésente, tantôt lumineuse à souhait, comme dans The MacArthur’s Home, A woman in the Sun, Western Motel, tantôt oblique et déjà assombrie, telle qu’elle se diffuse doucement dans House by a Road, Cape Cod Evening, ou alors artificielle, comme celle qui éclaire le Compartment C, Car 293, le célèbre Nighthawks, enfin nocturne, bleue, dense, comme dans The Bootleggers, New York Moovie House, Rooms for Tourists, que l’on identifierait à une oppressante demeure d’un film d’Hitchcock. C’est une "lumière qui éclaire mais ne réchauffe pas" dira un critique américain.

 

Guidé par cette lumière, le regard entre à la fois dans l’espace qui est restreint à la proximité, en raison d’un cadrage serré et frontal, et dans l’ambiance, que seuls des bruits naturels rompent : remous de l’eau, vent dans les herbes, galops de chevaux résonnant dans Bridle Path. Ailleurs règne le silence, parce que la lecture d’un journal suspend la parole, une tache à accomplir retient la communication. On croirait entendre des mots dans Conference at Night,Summer Evening, Hotel Lobby. On imagine une conversation qui semblerait normale entre ces gens bien habillés, détendus, de People in the Sun, au moins une question, une réplique qui signifierait attention minimum à l’autre ! Mais non, le silence est comme le lien inversé de la confidence, il éloigne, distend, isole. Personne ne se voit et ne s’écoute.

 

Josephine une à une commente les œuvres, elle les référence, les décrit avec ses termes qui peu à peu vont à leur tour repeindre le tableau, le dater, lui donner ses dimensions, son prix, ses couleurs, dévoiler sa technique, le situer, l’endroit où il a été exposé, qui l’achète, avec une abondance de détails qui le font vivre encore plus, lui donnent des résonances nouvelles, manifestes, cachées par l’auteur. Elle y met tout son cœur, son intelligence, sa perspicacité. Ses annotations expliquent la marche des processus créatifs. Son écriture est une seconde signature.  Elle pénètre loin dans la peinture de son mari, la transcrit au point que le lecteur assiste à son élaboration. Un exemple au hasard, parmi d’autres aussi brillants, Summer Time :